#184 - Interview des pépites - IADYS | Les Pépites Tech

#184 - Interview des pépites - IADYS

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Les Pépites Tech
20/10/2022

Interview du fondateur de IADYS Nicolas Carlési

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1. Présentez votre pépite en quelques mots. Quelle est votre proposition de valeur ?

IADYS est une start-up française spécialisée dans l’intelligence artificielle et la robotique au service de l’environnement, installée à Roquefort-la Bédoule. Depuis sa création en 2016, la société n’a cessé de se développer à l’international. Une première levée de fonds en juin 2021 a permis à l’entreprise d’accélérer cette stratégie d’expansion et de conforter sa position sur la scène internationale. IADYS est fière de pouvoir annoncer aujourd’hui une implantation significative et réussie en Asie Pacifique (Japon, Taiwan, Singapour et Australie), en Europe occidentale (Espagne, Allemagne, Suisse, Royaume-Uni, Finlande et Grèce), et plus récemment aux Emirats arabes unis.

L’entreprise conçoit, développe et commercialise des innovations à la croisée de l’Intelligence Artificielle et de la Robotique et notamment le Jellyfishbot : un petit robot capable de collecter les déchets et les hydrocarbures à la surface des plans d’eau. Véritable couteau suisse, il s’équipe grâce à un système de glissières, d’un cadre et de filets aux mailles plus ou moins petites (jusqu’à 7 tailles différentes), pour collecter au mieux les différents types de pollution. Il existe aujourd’hui des filets upcyclés, réutilisables ou jetables, à adapter en fonction des capacités de revalorisation* des déchets collectés des utilisateurs. Pour la collecte d’hydrocarbures, le Jellyfishbot est associé à des filets jetables remplis d’absorbants d’hydrocarbures qui capturent, une fois dans l’eau, les nappes, huiles et résidus gras. Ce robot est une solution efficace et flexible pour la dépollution de zones aquatiques plus ou moins étendues et/ou difficiles d’accès, en particulier pour les zones abritées : installations industrielles, ports, marinas, chantiers navals, lacs, canaux, mais aussi les golfs, bases de loisirs et les résidences hôtelières.

2. Comment avez-vous eu l’idée de ce projet et quel a été le problème rencontré ?

Passionné par la mer depuis l'enfance, Nicolas Carlési, fondateur de IADYS, pratique régulièrement des activités nautiques et subaquatiques telles que la voile et la plongée sous-marine. C'est lors de ces activités, et notamment au cours d'un voyage, qu'il a été frappé par la quantité de déchets présents dans l’eau. « Il y a quelques années, lors de mes vacances en Sicile, j’ai été confronté à la pollution marine : des amas de déchets flottants en plastique, des bouteilles, des fragments, et aussi de nombreux filets de pêche... J’ai pris conscience que je n’avais pas d’autre choix que d’ouvrir les yeux sur l’urgence de la situation ».

Titulaire d’un doctorat en robotique, Nicolas Carlési décide de mettre ses compétences au service de la protection de l’environnement marin. IADYS, pour Interactive Autonomous Dynamic Systems, est créée en septembre 2016. L’entreprise se positionne à l’interface entre les activités humaines et les milieux aquatiques en proposant des solutions visant à détecter et collecter les polluants avant qu’ils ne se retrouvent en haute mer.

3. Aujourd’hui, qui utilise votre solution ?

Le Jellyfishbot a été adopté aussi bien par des ports de plaisance (Saint-Tropez, Cannes, Barcelone, Ajaccio, La Turballe, Mayence en Allemagne, Neuchâtel en Suisse...), des ports de commerce (le Havre), des chantiers navals (Saint-Nazaire). Mais aussi des sociétés privées spécialisées dans la collecte des déchets comme la SMA (Société Monégasque d’Assainissement) à Monaco ou Dronaquatech à Dunkerque et des sociétés de dépollution de sites industriels comme Serpol.

Plus récemment, des instituts de recherche en France et à l’étranger ont fait le choix de s’équiper avec le Jellyfishbot pour mener leurs recherches sur les microplastiques. Enfin, plusieurs parcs d'attractions et bases de loisirs ont commencé à s'équiper, comme par exemple l’aquarium de Tokyo Yokohama Hakkeijima Sea Paradise, qui utilise le robot pour l’entretien de ses bassins, mais surtout comme outil pédagogique pour sensibiliser le public à la préservation du littoral.

Avec près d’une soixantaine de robots adoptés aussi bien par des ports de l’efficacité et la fiabilité du Jellyfishbot ne sont plus à démontrer.

4. Quel est le business model ? Est-il amené à évoluer ?

Le modèle économique est basé sur :

  • la vente de robots & Jellyfishbot;, options, accessoires et consommables (10 à 35 k€ lors de l’achat)
  • la vente d’abonnement aux plateformes web permettant d’analyser les données collectées par les Jellyfishbot (1,8 k€/an)
  • la vente de services d'entretien, de mise à jour et de maintenance des Jellyfishbot : abonnement annuel (de 1 à 2,3K€/an)
  • la vente de contrats d’assistance pour les distributeurs/clients à l’international (de 0,4 à 1,25 k€/an par robot)
  • la vente de prestation de dépollution ou de sensibilisation à la préservation de l'environnement aquatique (900 €/J)

5. Quelles sont les technologies que vous utilisez ?

La version téléopérée du Jellyfishbot est commercialisée depuis 2018. En janvier 2021, IADYS a franchi une nouvelle étape avec une version autonome du robot, qui a été testée pendant plusieurs mois dans le Port de Cassis. « C’est une fonctionnalité qui suscite beaucoup d’engouement de la part de nos clients. C’est un véritable gain d’efficacité pour les acquéreurs du Jellyfishbot car ils peuvent effectuer d’autres tâches pendant que le robot nettoie le plan d’eau », explique Nicolas Carlési.

Le principe est simple : il suffit de déterminer des points GPS qui forment la zone à nettoyer, directement sur l’écran de la radiocommande. Une fois programmé, le robot se dirige automatiquement vers la zone à nettoyer et y reste, en évitant les obstacles fixes sur son chemin. Pendant toute la durée de la mission, l’utilisateur a accès à distance à la vidéo sur la radiocommande grâce à une caméra embarquée. L’opérateur peut ensuite reprendre la main sur le robot pour nettoyer les zones difficiles ou hors de vue, ou le ramener au point de
départ, où il peut retirer et vider le filet. Cette version autonome ouvre la voie à des applications nécessitant la coopération de plusieurs robots pour traiter des zones encore plus étendues ou un entretien continu des espaces. Les clients peuvent également ajouter des options comme la connectivité 5G, un gyrophare pour alerter les personnes de son passage ou des accessoires comme différents types de filets dont un qui est à 100 % upcyclé ou un chariot de transport et de mise à l’eau pour améliorer les conditions de travail des personnels.

Nouveautés de 2022, le Jellyfishbot peut être équipé de différentes sondes pouvant mesurer la qualité de l’eau (salinité, température, turbidité, concentration de cyanobactéries et de phytoplancton, etc.) et effectuer des relevés bathymétriques jusqu’à 10 m de profondeur. Il facilite ainsi l’entretien et la surveillance des espaces aquatiques. Le Jellyfishbot peut fonctionner de façon autonome ou téléopérée, en garantissant la sécurité de l’opérateur. 

6. Quels sont vos besoins aujourd’hui ?

Suite aux problématiques d’approvisionnement en composants électroniques nous avons besoin de faire des stocks importants pour assurer la production future de nos robots, conjugué à l’augmentation des prix de ces composants cela représente une somme conséquente pour une société comme la nôtre, qui n’avait pas pour habitude de stocker jusqu’à présent.

7. Qui sont vos principaux concurrents ? Quelle est votre valeur ajouté ?

Notre Jellyfishbot est en concurrence directe avec deux autres véhicules robotisés beaucoup plus imposants, plus difficiles à mettre en œuvre, moins polyvalents (incapacité de collecter des hydrocarbures) et plus chers (minimum 25 k€). Mais également avec les solutions mécanisées fixes (écrémeurs pour les hydrocarbures, ou pour les macrodéchets) qui présentent l’avantage de pouvoir fonctionner en continu sans nécessiter d’opérateur humain en permanence (seulement pour récupérer les déchets collectés). Leur périmètre de collecte est néanmoins très restreint (quelques mètres) et leur caractère fixe nécessitent de les déplacer régulièrement (uniquement possible pour les écrémeurs) ou de multiplier les équipements. Le nettoyage complet d’un plan d’eau par des solutions mécanisées fixes est donc difficilement réalisable.

Les différentes fonctionnalités du Jellyfishbot lui permettent de répondre autant aux besoins des industriels et des services de l’antipollution qu’à ceux des structures portuaires ou de loisirs. Les solutions existantes ne sont pas adaptées pour une telle versatilité. La taille compacte du robot lui permet de se faufiler dans les recoins pour récupérer les déchets qui stagnent. Ayant un tirant d’eau faible, le robot permet de nettoyer en surface les zones difficilement accessibles par les opérateurs, en toute sécurité, et ce de façon autonome ou téléopérée. Ses filets d’une capacité de 80 L collectent aussi bien les macrodéchets flottants que les microplastiques et peuvent aussi être remplis d’absorbants pour collecter les hydrocarbures situés dans des zones inaccessibles par les bateaux ou les équipements de dépollution (exemple : proche des barges). Il peut aussi aider ces équipements à contenir les fuites en guidant des barrages antipollution ou à les replacer stratégiquement, de façon à minimiser la pollution. Equipé de capteurs il peut mesurer la qualité de l’eau (température, salinité, turbidité, concentrations de cyanobactéries et de phytoplancton) et réaliser des relevés bathymétriques.

8. Où voyez-vous l’entreprise dans un an ?

Depuis septembre nous sommes 18, nous n’étions que 9 il y a encore 1 an ! Pour le moment nous ne comptons pas agrandir l’équipe excepté l’équipe de production qui pourrait compter 2 personnes de plus pour poursuivre l’évolution et l’augmentation des ventes. Mais nous prévoyions de déployer au premier trimestre 2023 un second niveau d’autonomie, avec le lancement de l’Advanced Pack. Reprenant les mêmes fonctionnalités que la version OPEN PACK (caméra embarquée, GPS, 4G), le robot évoluera dans une zone définie par l’opérateur en totale autonomie dans un environnement avec obstacles mobiles sur la zone d’intervention. Cette version est notamment adaptée aux ports avec circulation de bateaux, avec la possibilité de détecter et d’éviter les obstacles mobiles tout autour du robot.

9. Partagez avec nous un moment insolite (succès, échec ou moment fun)

C'est une grande fierté en tant que chef d'entreprise de pouvoir fêter la 6ème année de IADYS et de voir le chemin parcouru. Ce qui n'était qu'une simple idée il y a encore sept ans, qui prenait peu à peu forme dans un bureau de 15m² d’une pépinière d’entreprises en Provence, est devenue une réalité qui prend chaque jour un peu plus d'ampleur en France et s'exporte à présent dans le monde. Ces six années n’ont pas été un long fleuve tranquille, nous avons vécus de grands moments de joie, de victoire mais aussi beaucoup d’autres de stress, d’abattement et parfois même de désillusion. C’est un combat de chaque jour, mais nous voilà aujourd'hui, célébrant notre soixantième robot déployé. Voir l'équipe s’agrandir (nous sommes aujourd’hui 18), le réseau de distributeurs s'étendre (nous comptons actuellement une dizaine de distributeurs), le Jellyfishbot gagner en popularité, mériter la confiance de nos investisseurs et conquérir de nouveaux clients nous galvanise tous. Et à mesure que nous recevons leurs retours, nous améliorons et ajustons notre offre, ce qui nous donne un cap et nous encourage à poursuivre nos efforts pour proposer sans cesse le meilleur produit possible. C’est avec confiance et détermination que je regarde l’avenir de IADYS, et il me tarde de vous présenter nos prochaines innovations pour la préservation de l’environnement et de l’eau et célébrer notre centième commande !

10. Si vous aviez un conseil à donner aux entrepreneurs

Surtout ne pas hésiter à se lancer lorsque l’idée du produit ou du service commence à réellement prendre forme. C’est important de suivre les programmes d’accompagnement de création d’entreprise, nous avons la chance en France de pouvoir compter sur des structures de type accélérateur, incubateur et pépinière qui permettent de structurer son projet et de nous accompagner dans les premiers pas de l’entreprise. Et ne pas avoir peur du vide au moment de se lancer !


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